Le revolver Gasser 1870 et le sabre d'officier ayant appartenu au 4ème Régiment d’Artillerie de l’Armée belge.

Le revolver Gasser 1870 et sabre d'officier ayant appartenu au Major Alfred Bertrang et au soldat Clorisse Delince, tous deux du 4ème Régiment d’Artillerie de l’Armée belge.

Le Gasser 1870 est un revolver adopté par la cavalerie austro-hongroise en l’année éponyme et en service jusqu’en 1898. Avec ses munitions originelles de 11,3 X 63 mmR, il s’agit clairement d’un gros calibre. Ce revolver est surnommé « monténégrin » de par son usage très répandu lors des guerres balkaniques à la fin du XIXème Siècle. Des armuriers de par le monde (dont Francotte à Liège, comme c’est le cas pour ce modèle-ci) ont produit ce revolver sous licence. Il s’agit donc d’une arme relativement courante pour l’époque.

Ce qui est remarquable ici, c’est la décoration mystérieuse de deux paires de clefs surmontées d’une couronne au-dessus du canon encadrant les mots « Vero Montenegro » (vrai Montenegro en Italien). On pourrait aisément penser aux armes papales en raison des clefs, mais la couronne contredit cette possibilité et rappelle les marquages anglais de l’époque victorienne, où une couronne surmonte deux sceptres. Mais ici, il s’agit clairement de deux clefs et non de sceptres. L’usage de l’Italien et les paires de clefs peuvent faire penser aux zouaves pontificaux corps de volontaires catholiques européens ayant combattu au service de Pie IX pour la défense des Etats Pontificaux contre les révolutionnaires garibaldiens entre 1860 et 1870, année de leur reddition et  dissolution. Mais rien ne permet de l’affirmer clairement. Même les pisces, symboles chrétiens, près du barillet sont des motifs décoratifs extrêmement courants à l’époque.

Revolver Gasser - Musée Grand Curtius à Liège

 

Le sabre est un sabre d’officier de modèle britannique la seconde moitié du XIXème Siècle. Que ce soit le cadeau d’un officier britannique (très possible pendant la Première Guerre Mondiale) ou une commande personnelle, cette arme n’est pas plus réglementaire que le revolver qui l’accompagne. Sur la lame, on peut voir une croix rubanée surmontée d’une couronne, ainsi que le cor de chasse, symbole très fréquent dans l’infanterie. La croix rubanée et le cor sont aussi deux symboles repris dans l’uniforme des zouaves pontificaux. Cependant, l’Angleterre étant peu catholique, il est peu probable que ces gravures y fassent référence.

Sabre - Musée Grand Curtius à Liège

Car ce qui est plus interpellant et qui a mis votre serviteur sur une énième fausse piste dans ce dossier, c’est le marquage « proved » étoilé sur la base de la lame. En fait il s’agit d’une marque anglaise de l’époque victorienne qui se trouve invariablement inscrite dans ce qui semble être l’étoile de David.

Sabre - Musée Grand Curtius à Liège

Le Major Bertrang n’a pas de passé de zouave pontifical. Né en 1847 à Dudelange, il est sorti de l’Ecole Royale Militaire en 1868 comme sous-lieutenant d’artillerie. Il sert dans cette arme, essentiellement au 4ème Régiment d’artillerie jusqu’à sa pension en 1906. Il doit tout de même avoir été rappelé lors du premier conflit mondial, car d’après la personne qui nous a prêté ces objets, le Major Bertrang a remis cette paire d’armes à son ordonnance, le soldat Clorisse Delincé, à la fin de la guerre. La consultation de leurs dossiers militaires, tous deux lacunaires pendant la première guerre mondiale, ne nous permet hélas aucune certitude.

Le soldat Delincé a fini sa carrière comme garde-champêtre après un parcours à l’Armée absolument impeccable. Sa petite-fille, Agnès Delrée, a hérité de cette paire d’armes et est venue nous les présenter. Qu’elle en soit ici remerciée.

Loïc Servais

Conservateur du département des armes, Grand Curtius.

 

Emplacement de l'exposition

Les objets sont visibles dans la vitrine de l'objet du mois. Hall d'entrée du musée Grand Curtius à Liège.

 

Légendes visuels

Un revolver Gasser 1870 et un sabre d'officier de l'armée belge à la fin du 19ème siècle.
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